Manifeste de la Permanence Vidéo des Luttes Sociales

Collectif ZIN TV

Afin d’ouvrir une brèche dans le pay­sage audio­vi­suel nous nous avons mis en place un axe infor­ma­tif et par­ti­ci­pa­tif au sein de ZIN TV qui accom­pagne et sti­mule les mou­ve­ments sociaux…

Chez ZIN TV une Per­ma­nence Vidéo des Luttes Sociales a été acti­vée depuis quelques années afin d’accueillir les demandes diverses et sans cesse crois­santes du mou­ve­ment social, du monde citoyen et associatif.
Ces demandes sous-entendent le besoin d’un trai­te­ment et d’un RELAIS MÉDIATIQUE de leurs reven­di­ca­tions et ini­tia­tives. Les médias tra­di­tion­nels ont une fâcheuse ten­dance à les igno­rer et lorsqu’ils les « traitent », sou­vent ils ne les com­prennent pas, sou­vent ils ne les abordent que par le biais des déran­ge­ments qu’ils causent à l’ordre éta­bli. Ain­si, ils les folk­lo­risent et dans cer­tains cas, ils vont jusqu’à les criminaliser.

Un silence inquié­tant règne pour mieux faire entendre la voix de la pen­sée unique. Durant trop long­temps, les syn­di­cats, les asso­cia­tions citoyennes et les orga­ni­sa­tions popu­laires sont res­tés inau­dibles, invi­sibles. Afin d’ouvrir une brèche dans le pay­sage audio­vi­suel nous nous avons mis en place un axe infor­ma­tif et par­ti­ci­pa­tif au sein de ZIN TV qui accom­pagne et sti­mule les mou­ve­ments sociaux : la Per­ma­nence Vidéo des Luttes Sociales.

Cette per­ma­nence vidéo existe grâce à la PARTICIPATION ACTIVE de per­sonnes mobi­li­sées à vou­loir infor­mer autre­ment. Pour ceux qui mai­trisent moins l’outil vidéo, nous avons mis en place un espace d’accueil et d’atelier conti­nu pour accom­pa­gner les par­ti­ci­pants dans la réa­li­sa­tion de ces actualités.

ENSEMBLE, nous construi­sons le JOURNAL DES LUTTES SOCIALES. Ces actua­li­tés sociales font écho à notre CAPACITÉ DE RÉSISTANCE et à notre devoir d’interrogation des poli­tiques menées dans notre démocratie.

Des mobi­li­sa­tions de l’année 2016, c’est un CRI PLURIEL et mul­ti­forme qui res­sort avec des mil­liers de voix qui s’interrogent et s’indignent dans tous les sec­teurs : des tra­vailleurs du rail au mou­ve­ment des sans-papiers en pas­sant par les mili­tants environnementaux.

Ain­si, si ce jour­nal des luttes sociales existe, c’est pour que ces actua­li­tés ne s’oublient pas, que ceux qui mani­festent se rap­pellent que leurs cris sont enten­dus, construi­sant ain­si notre MÉMOIRE SOCIALE belge et internationale.

Les repor­tages pro­duits deviennent ain­si des outils didac­tiques qui accom­pagnent les com­bats menés par les asso­cia­tions qui se les approprient
afin de sen­si­bi­li­ser et de mobi­li­ser des nou­veaux publics. Le fes­ti­val du ciné­ma d’ATTAC à Bruxelles, le Fes­ti­val Huma­ni­ci­té et le Fes­ti­val Espe­ran­zah, lors de leur der­nière édi­tion, ont eu la bonne idée de pro­je­ter avant chaque film, un repor­tage de la Per­ma­nence. Retrou­vant de cette manière cette fonc­tion d’antan qu’avait eu le ciné­ma docu­men­taire, d’INFORMER et de TEMOIGNER avant la séance de pro­jec­tion dans une salle de cinéma.

Cette per­ma­nence a pour voca­tion de per­du­rer dans son rôle d’amplificateur, tant bien que la par­ti­ci­pa­tion citoyenne puisse conti­nuer. Une par­ti­ci­pa­tion qui se décline à plu­sieurs niveaux : tant au niveau de la pro­duc­tion des actua­li­tés sociales fil­mées que du relais en termes de dif­fu­sion for­mé par l’ensemble des spec­ta­teurs. Ain­si CHACUN PEUT CONTRIBUER à FAIRE ENTENDRE CES VOIX.

-1216.jpg

« J’ai tou­jours acco­lé le qua­li­fi­ca­tif d’urgence à mon ciné­ma. Parce que chaque matin, lorsque je me lève, il s’est pas­sé dans le monde envi­ron vingt mil­lions de choses nou­velles. Pen­dant mes huit heures de som­meil des gens sont morts à cause de la famine ou du manque de soins médi­caux, il s’est pas­sé divers actes de vio­lence par­tout sur la pla­nète, des évé­ne­ments ter­ribles se sont dérou­lés. Alors, lorsque je me lève, mon pre­mier geste est d’allumer la radio et d’ouvrir le jour­nal pour savoir ce qui s’est pas­sé. C’est ain­si qu’à chaque jour je constate que je ne peux res­ter là, tran­quille, face à ce qui se passe. Je dois répondre à ces évé­ne­ments. C’est pour cela que je fais des films : pour enre­gis­trer, pour infor­mer, pour deve­nir une sorte de pro­cu­reur inter­ro­geant les évé­ne­ments qui se sont pro­duits au cours des der­nières heures. » San­tia­go Alva­rez, cinéaste Cubain

 

Manifeste de la Permanence Vidéo des Luttes Sociales

1. L’objectivité est un leurre

Toute inter­pré­ta­tion du réel est de la fiction.
Dans ce sens, nous rédui­sons le réel à un cadre, à une durée, aux deux dimen­sions de l’écran, mais sans pré­tendre à l’objectivité.
Nous ne cachons pas notre sub­jec­ti­vi­té, nos par­tis pris, nos manques, nos choix.

2. La parole filmée

La parole fil­mée est pour nous, un moyen de se mettre en retrait, d’être un pas­seur d’expérience, d’histoires, d’Histoire. Le témoi­gnage tra­verse l’écran avec sa trou­blante puis­sance qui résulte autant de son conte­nu que de la manière dont elle se livre. La véri­table parole popu­laire s’articule autour de ses propres néces­si­tés, contraintes et condi­tions de vie.
C’est cette parole popu­laire avec laquelle on tra­vaille et qu’on orga­nise dans un dis­cours col­lec­tif de telle manière à qu’elle acquière toute sa puissance.

3. Une culture du dialogue

Nous n’arrivons pas sur le ter­rain avec une thèse à démon­trer, ni avec un mono­logue de jour­na­liste qui dicte au spec­ta­teur ce qu’il faut pen­ser. Notre puis­sance est celle d’écouter et de poser des ques­tions, naïves et simples. Non pas que nous n’avons pas com­pris, c’est que nous n’en savons pas plus que le spec­ta­teur. Nous met­tons volon­tai­re­ment de côté notre connais­sance car nous ne sommes défi­ni­ti­ve­ment pas les pro­ta­go­nistes de l’information.

4. Une camé­ra inclusive

Chez ZIN TV, le cadre de la camé­ra se décadre pour inclure, pour contex­tua­li­ser, asso­cier ou com­men­ter, il tremble par­fois, il regarde, il com­mente, il humanise.

Habi­tuel­le­ment, le cadre de la camé­ra est cen­tré sur le jour­na­liste, sou­mise à son égo. Là où le jour­na­liste clas­sique se met en avant-plan face à la camé­ra et place l’événement qu’il est venu cou­vrir en arrière-plan, nous le dépas­sons et nous nous plon­geons dans le décor.

5. Des choix rédac­tion­nels liés aux réa­li­tés sociales

L’agenda des mou­ve­ments sociaux est notre agen­da, nous le publions d’ailleurs sur notre site inter­net que nous actua­li­sons quotidiennement.
La quan­ti­té d’initiatives citoyennes et d’activités mili­tantes témoigne du four­mille­ment des acteurs du chan­ge­ment et déter­mine notre choix rédactionnel.

6. Un droit de suite

Nos repor­tages tentent d’articuler les faits et non pas de les iso­ler. Nous explo­rons d’autres dimen­sions d’un conflit, d’une lutte. Nous ne nous conten­tons pas de fil­mer un pro­blème, une dénon­cia­tion ou un témoi­gnage. La suite logique est d’aboutir à sa réso­lu­tion et même de reve­nir long­temps après pour pro­po­ser un droit de suite. Dans le sous-texte de ces repor­tages s’élabore un mes­sage fon­da­men­tal en sou­tien de la digni­té et la force des citoyens en lutte, capables de résis­ter aux pires agres­sions, et de réagir.

7. L’intelligence collective

Le dis­po­si­tif d’un repor­tage tel que nous le conce­vons se fait dans le par­tage du tra­vail, de l’organisation et des déci­sions. Le film béné­fi­cie de l’intelligence col­lec­tive, de la dis­cus­sion des dif­fé­rents points de vue et de l’analyse de la réa­li­té avec ses contra­dic­tions. L’heure est à l’anonymat dans la col­lec­ti­vi­té, pour rompre avec la divi­sion tech­nique du tra­vail et avec le culte de l’auteur.
C’est pour cela que les géné­riques de nos repor­tages ne portent que le logo de ZIN TV.

8. Décloi­son­ner les formats

Il est ridi­cule de can­ton­ner le mode repor­tage dans un for­mat, un moule nar­ra­tif dans lequel on coule la réa­li­té à chaque reprise. Au contraire, nous sti­mu­lons la recherche for­melle, la poro­si­té des fron­tières et la libé­ra­tion du lan­gage audiovisuel.

9. Un rap­port de confiance

Les pro­ta­go­nistes d’une mani­fes­ta­tion s’expriment dans l’espace public, il est donc nor­mal qu’ils s’exposent aux prises de vues. S’ils ne dési­rent pas être fil­més, ils se masquent. Si les concer­nés nous le demandent expli­ci­te­ment, nous ne les fil­mons pas ou bien nous nous enga­geons à les mas­quer en post-production.

10. Les citoyens sont d’excellents jour­na­listes en puissance

Nous aidons les citoyens à s’exprimer au mieux sur la pro­blé­ma­tique qui les concerne. Nous les outillons afin qu’ils puissent s’améliorer et s’autonomiser. Nous créons et publions des docu­ments péda­go­giques sur notre site afin qu’ils puissent libre­ment en disposer.
Nous ouvrons éga­le­ment un espace d’éducation per­ma­nente où ils peuvent être accueillis afin de se perfectionner.

11. Une démarche qui s’ancre dans une his­toire de filiation

L’espace d’élaboration de l’information citoyenne met ses pas dans ceux qui nous ont pré­cé­dé et ont à leur manière hono­ré le journalisme.
Un pan­théon de réfé­rences com­munes éclairent notre pra­tique jour­na­lis­tique : Rodol­fo Walsh, Nor­bert Zon­go, Mun­tadhar al Zai­di, Edouard Per­rin, John Reed, Glenn Green­wald, Eduar­do Galea­no, mais aus­si des col­lec­tifs comme Indy­mé­dia, le news­reel aux Etats-Unis, les groupes Med­ve­kine en France, de Wereld Mor­gen en Bel­gique, etc.

12. Mémoire des luttes sociales

La pro­blé­ma­tique de nos repor­tages est com­pré­hen­sible par un large public et elle tient compte du spec­ta­teur étran­ger. En effet, le repor­tage peut-être regar­dé dans un autre pays où la pro­blé­ma­tique trai­tée peut ren­con­trer aus­si un vif inté­rêt. L’approche de nos repor­tages est intem­po­relle, ils docu­mentent le réel et l’aident à tra­ver­ser le temps. Son trai­te­ment sera donc libre esthé­ti­que­ment. Ain­si nous construi­sons une mémoire des luttes sociales.