Appel/pétition : les radios libres et gratuites contre le rouleau compresseur du numérique

Face à cette logique de consommation de contrainte, de rentabilité, d’uniformisation, nous, nous restons illogiques et Non, nous ne crèverons pas !

RADIOSenLUTTE.jpgle 28 mai 2012

Nous publions ci-des­sous le texte d’un Appel/pétition lan­cé sur le site « Radios en luttes ». Le signer à la même adresse.

La RNT : mai 2012- État des lieux

Il y a plus de 30 ans, le mou­ve­ment des radios libres fai­sait tom­ber le mono­pole d’État sur la radio­dif­fu­sion et ouvrait la bande FM aux mul­tiples expres­sions sociales, cultu­relles, poli­tiques et musi­cales. Beau­coup des « his­to­riques » ont dis­pa­ru ou bas­cu­lé plus ou moins dans la pub et sont pas­sées du côté com­mer­cial. Cepen­dant nous res­tons un cer­tain nombre à reven­di­quer notre indé­pen­dance et notre liber­té de contenu.

La dif­fu­sion hert­zienne reste pour nous la plus adap­tée car elle est simple, de qua­li­té et peu oné­reuse. En 2008, le CSA som­mait les radios asso­cia­tives de ren­trer dans les rangs du numé­rique. A cette époque déjà, nous for­mu­lions des réti­cences (Voir le texte les radios au crible du numé­rique). Aujourd’hui, alors que le pro­jet du numé­rique avait été gelé, nous avons appris par voie de presse qu’il était relan­cé, avec en prime un « cadeau » empoi­son­né : la créa­tion de la radio payante ! Le CSA, sui­vi par les syn­di­cats, cen­sés repré­sen­ter les radios asso­cia­tives, foncent sans concer­ta­tion ni réflexion véri­table vers un pro­jet qui pour­tant implique une véri­table trans­for­ma­tion du Média Radio. Il nous pré­sente ce pas­sage comme iné­luc­table : suivre ou aller cre­ver sur la bande FM…

Mal­gré l’expérience désas­treuse de la télé numé­rique (TNT), la Radio Numé­rique Ter­restre nous est pré­sen­tée comme une inno­va­tion tech­no­lo­gique ultra moderne : meilleur son, meilleure dif­fu­sion, meilleure récep­tion. Des argu­ments d’industriels et de finan­ciers qui sont dis­cu­tables voire mensongers.

La RNT : le clo­nage des pro­grammes n’est pas plu­ra­lisme : la RNT nous est pré­sen­tée comme la garan­tie d’une plus grande diver­si­té. Aujourd’hui, 600 radios asso­cia­tives garan­tissent la plu­ra­li­té des opi­nions et l’accès démo­cra­tique aux médias. Elles puisent leur richesse dans leur capa­ci­té à relayer la parole des acteurs locaux à tra­vers des moyens d’expression peu ou pas employés par les autres médias, offrant ain­si une diver­si­té d’expression, d’expérimentation, de créa­tion et d’innovation tant au niveau du conte­nu que de la forme. Or, nous voyons dans le pas­sage au numé­rique une mise en dan­ger des radios asso­cia­tives non com­mer­ciales, une volon­té d’uniformisation du pay­sage radio­pho­nique et la consé­cra­tion d’une concep­tion tech­no­cra­tique de l’audiovisuel.

La RNT, çà coûte cher ! Le pas­sage au numé­rique repré­sente un coût consi­dé­rable pour les radios : inves­tis­se­ment en maté­riel, for­ma­tion à la nou­velle tech­no­lo­gie et double dif­fu­sion pen­dant plu­sieurs années (sur la bande FM et sur la bande numé­rique). Or, à ce jour, dans le contexte géné­ra­li­sé de baisse des aides publiques qui affecte l’ensemble du sec­teur asso­cia­tif, aucune réponse satis­fai­sante n’a été don­née concer­nant la prise en charge du finan­ce­ment de la dif­fu­sion en numé­rique des radios asso­cia­tives. Les coûts liés à la double dif­fu­sion risquent de les rendre tou­jours plus dépen­dantes des sub­ven­tions d’état, régio­nales, locales et donc du bon vou­loir des élus, au risque de com­pro­mettre leur liber­té édi­to­riale. La réa­li­té des radios sans publi­ci­té ni pro­fit est tout bon­ne­ment igno­rée. Il en va d’elles comme, par exemple, des mini­mas sociaux, de la san­té, de l’éducation ou de la recherche fon­da­men­tale : ce qui n’est pas ren­table pour­rait tout aus­si bien dis­pa­raître. Si pas­sage à la radio numé­rique il y a, nous deman­dons une prise en charge des coûts de dif­fu­sion par les pou­voirs publics (par le FSER, Fond de Sou­tien à l’Expression Radio­pho­nique ou tout autre dispositif).

Avec la RNT, le son ne sera pas de meilleure qua­li­té ! La RNT pro­po­se­ra des taux de com­pres­sion du signal sonore entre 64 kbps et 256 kbps, c’est-à-dire entre une très mau­vaise qua­li­té et une (rela­ti­ve­ment) bonne qua­li­té. Le prin­cipe démo­cra­tique d’une qua­li­té équi­va­lente pour tous dis­pa­raît lors du pas­sage à la RNT. La RNT, c’est un meilleur son pour tout le monde sauf pour ceux qui ne pour­ront pas se le payer.

Avec le numé­rique un nou­vel acteur pri­vé payant entre en scène : le mul­ti­plexeur, canal dans lequel huit ou neuf radios doivent entrer, de gré ou de force. Des mariages for­cés entre des radios n’ayant pas la même sen­si­bi­li­té devront donc être conclus. Que pèse­ra alors une petite radio asso­cia­tive face à des radios com­mer­ciales devant le conseil d’administration d’une socié­té de mul­ti­plexage pri­vée ? Le mul­ti­plexage signe éga­le­ment la fin de l’auto-diffusion et met en dan­ger de nom­breuses petites radios asso­cia­tives locales telles que Radio Lar­zac. Une double obli­ga­tion s’impose aux radios : celle de tran­si­ter par un pres­ta­taire et celle de se « pac­ser » avec d’autres radios pour être diffusées.

Avec la RNT, pour le même coût, les zones de dif­fu­sion seront réduites ce qui pri­ve­ra une par­tie des audi­teurs des radios locales de leurs pro­grammes. En région pari­sienne, si nous pre­nons l’exemple de Fré­quence Paris Plu­rielle, une grande par­tie de la popu­la­tion de la ban­lieue, celle de cer­taines pri­sons, ne sera plus cou­verte. Ce public auquel nous sommes atta­chés et qui fait la richesse de notre antenne est pour­tant notre audi­to­rat depuis la créa­tion de la radio, il y a 20 ans !

Le numé­rique c’est aus­si une logique binaire et sans nuance : ça marche ou ça ne marche pas du tout ! Adieu la bidouille et la liber­té de cap­ter la bande FM avec un vieux tran­sis­tor. Le pas­sage au numé­rique, c’est des nou­veaux postes radio qui per­mettent de déve­lop­per la publi­ci­té et l’image (!) sur des écrans : il inté­resse prin­ci­pa­le­ment les radios qui sou­haitent exploi­ter ces don­nées associées.

Actuel­le­ment, chaque foyer pos­sède au moins six postes radios. Pour rece­voir la radio numé­rique les audi­teurs devront impé­ra­ti­ve­ment ache­ter de nou­veaux postes récep­teurs. Des mil­lions de postes FM vont être jetés pour être rem­pla­cés par du maté­riel cher, à l’obsolescence pro­gram­mée. Une manne pour les indus­triels bien sûr mais des dépenses sup­plé­men­taires pour de nom­breuses per­sonnes qui n’ont ni les moyens finan­ciers, ni l’aisance tech­nique, pour accé­der à cette tech­no­lo­gie. Avec d’autres, nous avons fait le choix de don­ner la parole à ceux qui ne l’ont pas : les habi­tants des quar­tiers popu­laires, les non-pro­fes­sion­nels, les non-spé­cia­listes, les com­mu­nau­tés immi­grées, le mou­ve­ment social, les acteurs et actrices des luttes, les ini­tia­tives cultu­relles non-com­mer­ciales… La radio qui est en FM un média simple d’accès et qua­si­ment gra­tuit risque de deve­nir un outil tech­no­lo­gique discriminant.

Face à cette logique de consom­ma­tion de contrainte, de ren­ta­bi­li­té, d’uniformisation, nous, nous res­tons illo­giques et Non, nous ne crè­ve­rons pas !

NOUS EXIGEONS :

- Le main­tien de la bande FM sur le long terme.

- Que les radios puissent effec­tuer leur tran­si­tion vers le numé­rique quand elles le souhaiteront.

- Que le pas­sage au numé­rique n’occasionne la dis­pa­ri­tion d’aucune radio asso­cia­tive non-commerciale

- Le pas­sage au numé­rique doit être finan­cé par l’Etat, aus­si bien la dif­fu­sion que les fras d’équipement par le biais du FSER ou autre

[L’appel de radios en lutte de juin 2011 — [« Les radios libres au crible du numé­rique »>http://radiosenlutte.free.fr/spip.p…] avait recueilli plus de 4000 signatures-

Une nou­velle péti­tion est ouverte !

- À signer sur le site « Radios en luttes ».TractRNT2012.pdf