Grèce : Un détective pose quelques questions troublantes

Euh… une dernière p’tite question M’sieurs-Dames. Alors voilà, j’ai bien réfléchi et il y a certaines choses que je ne comprends toujours pas...

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Euh… une der­nière p’tite ques­tion M’sieurs-Dames. Oh trois fois rien, un der­nier p’tit détail et puis je vous laisse. Je sais que vous êtes très occu­pés ces temps-ci !

Alors voi­là, j’ai bien réflé­chi et il y a cer­taines choses que je ne com­prends tou­jours pas :

– Vous M. Hank Paul­son, pré­sident de Gold­man Sachs à l’époque, vous avez aidé la Grèce à emprun­ter des mil­liards d’euros en secret. Ensuite, grâce à votre ingé­nie­rie comp­table, vous l’avez aidé à contour­ner les règles euro­péennes, celles qui limitent le niveau de la dette publique. Tout cela afin qu’elle puisse ren­trer dans l’Euro… pen­dant que vous spé­cu­liez contre elle.

C’est bien ça, n’est-ce pas ?

– Vous M. Wim Dui­sen­berg, alors que vous étiez pré­sident de la BCE et lau­réat du prix De la vision pour l’Europe, vous avez don­né votre accord à l’entrée de la Grèce dans l’Euro… sans voir que ses comptes étaient aus­si maquillés qu’une voi­ture volée.

Vous devez être très myope, n’est-ce pas ?

– Vous M. Tri­chet, suc­ces­seur de M. Dui­sen­berg, deman­dez à la Grèce pas plus tard qu’hier matin, je vous cite, « de pré­sen­ter un plan cré­dible ». Et quand vous étiez en fonc­tion, vous disiez que le pays devait, je cite tou­jours, « cor­ri­ger avec la plus extrême vigueur sa tra­jec­toire aber­rante, afin de pou­voir rame­ner son défi­cit de 12,7 % du PIB en 2009 à… 3 % en 2012. »

Vous avez fait une école de vété­ri­naire, M’sieur ?

– Vous M. Strauss-Kahn, vous étiez direc­teur du FMI lorsque vous avez, avec les États de la zone euro, prê­té 110 mil­liards à la Grèce, pen­dant que la BCE se met­tait à rache­ter des titres de cette même dette pour évi­ter que leur prix ne s’effondre. Vous avez donc fait pas­ser la dette grecque, des comptes des banques fran­çaises et alle­mandes à… ceux des États.

Cela en accor­dant un prêt à un pays en ces­sa­tion de paie­ment, ce qui est rigou­reu­se­ment inter­dit par le règle­ment du FMI. C’est bien ça, M’sieur ?

– Vous M. Jun­cker, après avoir été le Pre­mier ministre, à l’insu de votre plein gré, d’un para­dis fis­cal pen­dant près de 20 ans, trois fois Pré­sident de l’Eurogroupe, vous êtes l’actuel Pré­sident de la Com­mis­sion Euro­péenne, et vous décla­rez, je vous cite, « ne pas com­prendre le résul­tat du réfé­ren­dum grec ».

Il ne peut tou­jours pas y avoir de choix démo­cra­tiques contre les trai­tés euro­péens, c’est bien ça M’sieur ?

– Pour vous M. Schäuble, je vous cite, « la cré­di­bi­li­té de la zone euro est plus impor­tante que son intégrité ».

L’Euro c’est l’autre nom du Mark, et le Mark c’est plus impor­tant que ces fei­gnants de Grecs… ou que la sta­bi­li­té du conti­nent. La Règle plu­tôt que la Paix, c’est bien ça M’sieur ?

– Vous Madame Mer­kel, vous avez men­ti à votre peuple en disant que la Grèce paie­rait l’intégralité de sa dette, alors que vous saviez per­ti­nem­ment que c’était impos­sible. Et main­te­nant, vous pré­fé­rez cou­rir le risque de voir explo­ser l’UE, plu­tôt que de ne pas être réélue en avouant votre mensonge.

C’est bien ça M’Dame ?

Eh bien, j’vais vous dire M’sieurs-Dames, ce que je ne com­prends tou­jours pas.

Je ne com­prends tou­jours pas que vous soyez encore en liber­té ! Que vous n’ayez pas été pré­sen­tés à un juge, pour répondre de vos délits !

Encore un détail. J’vous connais bien M’sieurs-Dames, deman­dez à ma femme ! Je côtoie les gens comme vous depuis des années. De belles per­sonnes, riches (très), élé­gantes, racées, culti­vées et comme il se doit, condes­cen­dantes, mépri­santes même, car si sûres de leur supé­rio­ri­té intellectuelle.

Alors que moi… R’gardez-moi, de quoi j’ai l’air ? Pas celui d’un Expert ami-ami avec les Maitres du Monde, ah ça non ! Plu­tôt d’un petit rital dont les grands-parents sont pas­sés par Ellis Island. Petit, mal fago­té dans mon imper­méable informe, les che­veux en pétard, je pousse le mau­vais goût et la pro­vo­ca­tion jusqu’à rou­ler dans une voi­ture hors‑d’âge, une voi­ture de pauvre (et fran­çaise qui plus est !). Et pour aggra­ver mon cas, je mul­ti­plie les digres­sions sur ma vie domes­tique, et me mêle de ce qui me regarde en vous posant des ques­tions idiotes sur la Grèce !

Quel manque d’éducation, n’est-ce pas ?

Ah, je vois à vos yeux qui s’écarquillent, que vous venez de me reconnaitre !

Eh oui, je suis le Peuple, celui qui vu du haut de votre olympe de car­ton-pâte est sale, bête et méchant. Je repré­sente, quelle hor­reur, la lutte des classes !

Et comme dans ma série, je viens de vous per­cer à jour M’sieurs-Dames. Vous ne pou­vez plus vous cacher der­rière les ins­ti­tu­tions ou les traités.

Vous êtes tout nu, dans la lumière.

Juste une bande de voleurs et de pitoyables assassins !

Même mon chien le voit maintenant.

Source de l’ar­ticle : blog de Paul Jorion