Libye : le silence assourdissant

Le gouvernement britannique, entre autres, n’a plus besoin de cacher ses véritables objectifs

Les “Verts” comme éco­lo Bel­gique ou la majeure par­tie de la GUE (Gauche Unie Euro­péenne) appuyèrent dès le début ce nou­veau cas d’impérialisme huma­ni­taire. On accu­sa le pré­sident Cha­vez de sou­te­nir Kadha­fi “pen­dant qu’il bom­bar­dait la popu­la­tion de Tri­po­li”. Une fois de plus, on nous a ven­du une fausse pré­misse et, comme dirait Noam Chom­sky, nous avons per­mis la fabri­ca­tion de notre consen­te­ment. Bom­bar­der des civils, tuer des femmes et des enfants, tout le temps néces­saire, “afin de les pro­té­ger”. Mais les peuples ont une mémoire.

Image_1-103.pngPar Jody Mc INTYRE (The Independent)

A pré­sent nous allons envoyer des Apache pour bom­bar­der les civils libyens. Une esca­lade de plus dans une guerre san­glante de l’OTAN de plus. Ou, comme l’a dit le Colo­nel Jason Ethe­ring­ton, « ce n’est qu’un élé­ment de plus dans le jeu ».

La tota­li­té des médias suivent la ligne offi­cielle. Il s’agit d’une guerre pour pro­té­ger les civils. Il s’agit d’une guerre pour for­cer Kadha­fi à par­tir. Comme si les gou­ver­ne­ment occi­den­taux, avec leur brillant his­to­rique de vio­la­tions des droits de l’homme à tra­vers le monde, avaient la moindre auto­ri­té morale pour por­ter un juge­ment sur le gou­ver­ne­ment Libyen. La rhé­to­rique d’Etherington révèle la minable véri­té, cette guerre n’est qu’un jeu pour nous, un « jeu » qui mérite d’être élargi.

Même Al Jazee­ra raconte la même his­toire de « rebelles » qui cap­turent des villes les unes après les autres. Mais la chaine ne dif­fuse pas d’images de Tri­po­li, la capi­tale, où, à l’exception des bom­bar­de­ments de l’OTAN, les gens conti­nuent de vivre leurs vies. Et on ne montre jamais les images des crimes com­mis par cette soi-disant bri­gade « rebelle » qui a vio­lem­ment atta­qué les Libyens et Afri­cains noirs dans l’est du pays, en les qua­li­fiant de « mer­ce­naires afri­cains », embau­chés par Kadha­fi, même si tous les Libyens sont en fait des Afri­cains. Rien de tout ça n’est racon­té, parce que ça ne cadre pas avec la ver­sion offi­cielle. Les mer­veilleux diri­geants rebelles, dont beau­coup tra­vaillaient pour Kadha­fi il y a encore quelques mois, sont nos alliés. Kadha­fi, le méchant utile, est notre enne­mi juré.

Mais pour­quoi un tel silence ? Contrai­re­ment à l’Afghanistan et à l’Irak, qui ont pro­vo­qué d’énormes pro­tes­ta­tions à tra­vers le monde, les réac­tions devant la Libye ont été rela­ti­ve­ment faibles. On nous a ven­du une fausse pré­misse et, comme dirait Noam Chom­sky, nous avons per­mis la fabri­ca­tion de notre consentement.

Après le rideau de fumée ini­tial qui a bien fonc­tion­né, le gou­ver­ne­ment bri­tan­nique, entre autres, n’a plus besoin de cacher ses véri­tables objec­tifs. Même s’il n’en a jamais vrai­ment eu besoin. « Nous n’allons pas éta­blir une échéance, » dit William Hagie. Bien sûr que non, car l’impérialisme ne connait aucune limite lorsqu’il s’agit de faire la guerre.

J’ai tou­jours été frap­pée par les gens qui réagissent de façon hys­té­rique lorsqu’il s’agit d’une guerre où notre pays est impli­quée. Si vous faites remar­quer la réa­li­té de la situa­tion, ils vous accu­se­ront d’être indif­fé­rent au sort des civils libyens, ou de sou­te­nir une dic­ta­ture. En réa­li­té, c’est notre gou­ver­ne­ment qui a pour habi­tude de sou­te­nir les dic­ta­tures, et c’est notre gou­ver­ne­ment qui est en train de bom­bar­der des civils libyens. Comme l’a écrit cette semaine Frank Net­ter dans son blog « Straight Talk », « Cha­cun d’entre nous qui paie des impôts accepte taci­te­ment et indi­rec­te­ment le finan­ce­ment des bombes qui sont actuel­le­ment employées pour tuer des Afghans et des Libyens. Pour citer Sartre, “vous n’êtes pas mer­veilleux, vous êtes des assassins” ».

Cela n’a rien à avoir avec la pro­tec­tion des civils, et tout à voir avec le réta­blis­se­ment d’une domi­na­tion mili­taire et éco­no­mique en perte de vitesse dans la région. Lorsqu’on exa­mine la liste des rares pays dans le monde où aucune base mili­taire US n’est implan­tée, il devient beau­coup plus clair qui sont nos « enne­mis » et pour­quoi on nous les pré­sente comme tels.

Jody McIn­tyre